ROKH - Dätcha Mandala (2017)
Pistes :
01. Have You Seen The Light ?
02. Da Blues
03. Misery
04. Anâhata
05. Uncommon Travel
06. Smiling Man
07. Human Free
08. Loot
Musiciens :
Ici Jb - Jérem - Nico
Chronique :
Il ont invoqué Odin Théné, Loki, Hecate. Ils se sont connectés aux énergies créatrices, ont reçu les initiations et les bénédictions, célébré et fait descendre la lune. Arabesques électriques rondes et rauques, motifs cachemire peau de bêtes et Oliban. Batterie velours instinctive, ambre et Patchouli. Volutes de basse, sur tapis persans, effluves de myrrhe et de sauge.
Comment trois bordelais ont, par une belle soirée de fin d’été, chamanisé le stade de France en ouverture pour les Insus, et du même coup renversé le cœur toute la planète rock hexagonale. Recueil de filtres d’amour et autres charmes et sortilèges, leur premier album Rokh s’en vient ce 10 novembre 2017, vous conter les mythes et légendes du tréfonds des âges, portés par une expérience musicale ésotérique primale et délicieusement régressive.
Si la très élégante retenue des premières notes de « How You See The Light » verrouille d’entrée un goût très sûr en matière d’esthétique musicale, ce qui s’en suit dénote tout aussi clairement une profonde inclination pour le rock 70’s et pour le cachet inégalable du 100% analogique, ici brillamment conduis par Clive Martin.
Le manifeste « Da Blues » porte son titre comme un étendard et cristallise l’héritage Led Zep avec une classe incandescente. Romantisme noir, orchestration dramatique et théâtralité glamrock, le piano de « Misery » met en relief le timbre atypique de Nicolas et donne une profondeur mélancolique légèrement désuète au morceau. « Anâhata » : « Se réfère au concept védique d’un son non humain, le son du royaume céleste », « 4eme Charkhra centre du cœur, de l’équilibre et de l’amour » ou pour ceux que j’ai perdus en route, un hymne à la gratitude d’être en vie, une ode à la chouille super catchy qui apporte un message à peine subliminal d’une sagesse désarmante : soyez heureux, buvez du pif et n’oubliez pas de vous envoyer en l’air (enfin moi j’ai compris ça).
« Uncommon Travel » pue le road trip, vêtements crasseux, gasoil, poussière, rythmique rouleau compresseur, incantations tribales, riffs magnétiques et Ukulélé. Le voyage continue et sur la route, des personnages et des paysages sortis d’un film de Wes Anderson ou d’un Tarantino. Le désert et son vide irréel. La montagne et sa roche inaccessible, sa verdure entreprenante. La morsure de la glace, par dix degrés fahrenheit, sable d’ébène à Tenerife ou en Islande et poussière d’ange immaculée et brûlante sur une côte oubliée du Yucatan. « Smiling Man » travaille sur l’imaginaire et la réminiscence. Une orchestration remarquable qui floute les repères de temps et d’espace, annule les frontières, intemporalité toute puissante et exacerbation sensorielle. Cap sur l’Orient et la saveur cuivrée et épicée du sitar de « Human Free ». Rouge sang, bleu roi, safran et fuchsia. Célébration encore, amour toujours, l’enthousiasme éclatant, la paix aussi, la paix surtout.
Le grimoire se referme. Pas sans vous convier à un dernier esbat : « Loot ». Majestueux, magistral. Heavy stoner psyché-cosmique de haut vol. Tour à tour grave, désespéré puis apaisé.
Les mauvaises langues, les rabat-joie et les je-sais-tout ne manqueront pas de souligner l’absence d’innovation musicale majeure de cet opus. Ils n’ont qu’à retourner ramper sous leur rocher au fond de leur caverne miteuse pendant que nous autres nous délectons de la virtuosité musicale exceptionnelle de ce trio ainsi que de l’intelligence émotionnelle et de la passion qu’ils ont mis dans cette réalisation.
Je souhaite une longue et belle vie à Dätcha Mandala, tout le succès qui leur est dû avec cet album. Quand à vous mes amis inch’allah : peace, love, understanding, shalom y vaya con dios.
Note Rocklegends : 4 /5
Sheena